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Gloria Bash : de l’ombre des critiques de Koffi Olomidé à la lumière de Paris

Gloria Bash : de l’ombre des critiques de Koffi Olomidé à la lumière de Paris

Du podium de « Vodacom Best of the Best » au podium de Accor Arena ce 22 avril à Paris, le parcours de la chanteuse Gloria Bash a pris tout à contre-pied, même ceux qui la critiquaient dans ses premiers pas. Elle représentera Goma au concert « Solidarité Congo » plus de deux ans après que Koffi Olomidé lui a dit, avec raison, qu’elle n’avait pas le niveau.

« Sincèrement, pour mon pays, pour le Congo, je demande pardon : vous n’êtes pas la chanteuse que moi j’aurais envoyée à Sony Universal, au Canada, représenter le pays ce soir ». Ce sont les paroles de la légende Koffi Olomidé après la prestation en catastrophe de la chanteuse Gloria Bash à l’édition 2022 du télé crochet congolais « Vodacom Best of the Best ». Le chanteur congolais ne s’était pas arrêté là : « J’ai souffert de vous écouter jusqu’à la fin. Je ne voulais pas être odieux ni méchant mais sincèrement, je n’ai pas aimé ».

La participation de la gomatracienne à ce concours qui a élevé certains de grands noms de la musique congolaise actuelle, dont Innoss’B, s’était transformée en un baptême de feu particulièrement douloureux. Les mots tranchants de Koffi avaient retenti comme un coup de massue, déclenchant une vague d’invectives pour l’artiste même au niveau national. La scène, diffusée en direct à la télé, avait exposé l’artiste, encore en rodage à l’époque, aux critiques parfois impitoyables du public.

Plus de deux ans plus tard, Koffi serait plus clément. Le chemin de Gloria Bash depuis cette compétition est de ceux qui forcent l’admiration. Beaucoup pensaient déjà que c’était le début de la descente aux enfers mais pour Gloria, ce fut un point de départ, une source d’énergie inattendue.

Eliminée de la compétition et rentrée dans sa terre gomatracienne, loin des projecteurs cruels de Kinshasa, elle n’a pas sombré dans le découragement, bien au contraire. Elle a puisé dans cette expérience amère une force motrice. Elle a travaillé sur son premier grand projet de carrière, l’EP « Patronna », qui s’est apparenté comme un témoignage éloquent de la leçon apprise. Le titre même du projet, empreint d’une assurance nouvelle, semblait défier les critiques passées.

« Le parcours de Gloria est atypique au vu de ce que nous avons l’habitude de vivre à Goma », a reconnu le journaliste Jacques Kyanga. « Elle est venue et nous l’avons aimée avant qu’elle n’affiche des limites et nous déçoive quand son niveau prenait de proportions considérables. Malgré les tempêtes et les vagues, elle a su garder le cap et s’accrocher sur ses forces. Aujourd’hui, c’est une fierté ». Quant à Gaethan Kombi, lui aussi journaliste et mélomane de la musique locale, « Gloria Bash est un véritable scandale de précocité ».

Une fierté que le destin, parfois facétieux, a fini par jouer en sa faveur. A la fin de 2024, l’abnégation de Gloria Bash a fini par attirer l’attention d’un acteur majeur de la scène musicale internationale : le label Black Star, cofondé par la superstar Gim’s et basé en France. « Je ne crois pas que le déclic vient de Koffi Olomidé », a insinué Jacques. « Moi je pense plutôt que tout est venu de la politique que l’artiste et son entourage ont mis en place. Gloria connaît vendre son image et dans le monde actuel, c’est un détail qui joue un rôle prépondérant dans le développement de tout ».

La signature dans le label a marqué un tournant décisif et une reconnaissance éclatante pour l’artiste. 2 chansons ont déjà vu le jour sous cette nouvelle bannière (Toza bien et Ada) qui témoignent l’évolution artistique palpable, d’une voix qui a gagné en assurance et d’une présence qui ne demande qu’à conquérir de nouvelles scènes. « En signant dans ce label sérieux, elle est passée d’une artiste des réseaux à une vraie artiste des scènes…elle devra cravacher deux ou trois fois plus qu’elle le faisait déjà », a déclaré Gaethan.

Aujourd’hui, l’ancienne candidate malheureuse de « Vodacom Best of the Best » s’apprête à vivre un moment historique pas seulement pour elle mais aussi pour toute la ville de Goma. Elle est invitée à se produire sur la scène du concert évènement « Solidarité Congo » à Paris. Un plateau de rêve où elle partagera la lumière avec ceux qui ont bercé ses aspirations : Fally Ipupa, Youssoupha, Dadju, et bien sûr, son nouveau mentor, Gim’s comme tant d’autres grands noms de la scène mondiale. Sur ce podium prestigieux, même elle n’est pas habituée de scène, Gloria n’aura pas la frousse parce qu’elle a « une particularité que n’ont malheureusement pas beaucoup d’artistes de sa région : l’intelligence », a pensé Kombi. « À ses communications toujours huilées, s’ajoute son expression assez facile et nette, deux éléments qui en font l’une des rares artistes gomatraciennes qui savent absolument, et à quelques détails près, ce qu’il faut donner aux médias et au public ».

« … personne de la nouvelle génération ne fait mieux »

Ce concert parisien n’est pas seulement une étape de plus dans la carrière de Gloria Bash. C’est une victoire éclatante contre le doute et le dénigrement. C’est la preuve qu’un revers, aussi public et douloureux soit-il, peut se transformer en tremplin vers les sommets comme elle bien les visés. Mais comment garder les deux pieds sur terre pour la jeune dame ? « Si elle veut rester tranquillement à ce niveau, il faut déjà qu’elle s’entoure bien, ce que je pense est déjà le cas », a conseillé JK avant de continuer : « Qu’elle évite certaines publications à caractère polémique ou tacle, aussi être méticuleux dans ce qu’elle propose autour de son image. Savoir chanter en live un moment sera impératif, elle se doit des efforts là-dessus ».

Ce soir, sur le podium de Accor Arena, Gloria Bash ne chantera pas seulement ses chansons, elle chantera sa résilience, sa détermination et la douce revanche d’une artiste qui a su transformer les pierres qu’on lui a lancées en un solide chemin vers les étoiles. Aussi, elle ne manquera pas de parler des atrocités liées à la guerre auxquelles sa ville est confrontée depuis plus de 30 ans. « Ce n’est peut-être pas l’unité de mesure pour la musique de Goma mais, en termes d’image qu’elle vend pour notre zone, personne de la nouvelle génération ne fait mieux » a fini par conclure Jacques Kyanga.

A propos de l'auteur

Par: David KASI

David KASI est consultant en Communication et Journaliste indépendant, spécialisé en culture, arts, sport et société. Il travaille aussi dans la presse écrite et collabore avec des médias internationaux en tant que free-lance. Également, il est photo-journaliste.
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1 Comment

  • LAMEK

    Quelle leçon de persévérance et de transformation ! Gloria Bash est la preuve vivante que les échecs ne définissent pas une carrière, mais peuvent en devenir le moteur. Fier de voir une fille de Goma briller à Paris. Comme quoi, le travail paie toujours !

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