Jenny Paria – Top 10 Prix Découvertes RFI 2025 : « voter pour moi, c’est une manière de dire qu’on a résisté »

Jenny Paria écrit l’histoire de la musique congolaise à son rythme. Après avoir participé à la Coupe du monde de slam poésie en 2022 en Belgique, étant le seul congolais, il est finaliste cette année pour le prestigieux Prix Découvertes RFI. Cette consécration, qui revient après un échec, le place dans l’histoire en devenant le premier artiste venu de Goma à se hisser dans cette liste. Grande Interview.
T.A : En 2024, tu as sorti officiellement que « Transe » et « Désert », comment juges-tu ton année 2024 ?
J.P : Je pense que j’ai évolué par rapport à d’autres années parce que, en terme de production on n’a pas grand-chose mais en terme de qualité et ce que je voulais donner, moi personnellement, je pense avoir donné une grande partie de moi-même. C’est cela que j’ai de grand à offrir dans la musique.
T.A : La grande nouvelle est que tu es parvenu à se hisser dans le TOP 10 du Prix Découvertes RFI 2025, qu’est-ce qui t’a poussé à postuler ? Raconte-nous le processus.
J.P : J’ai participé à ce prix deux fois. L’année 2023 je n’ai pas atteint ce niveau comme celle-ci. Il faut envoyer un dossier contenant 5 chansons, une vidéo de prestation live d’au moins 20 minutes. Après, si tu passes cette étape, on te met dans le top 40. C’est qui suit, c’est la liste de 10 candidats retenus. La nouvelle de cette année n’est pas tombée directement sur moi vu le contexte mais là, comme la connexion internet s’est rétablie, j’essaie de mobiliser les gens.
T.A : Penses-tu que tu peux aller la chercher cette bataille et la gagner comme tes compatriotes Céline Banza et Alesh l’ont fait ?
J.P : Je pense que les artistes, ou humainement, les gens grandissent et moi, aujourd’hui, faire partie de ces 10 candidatures retenues, c’est le plus grand trophée. La victoire pour moi, c’est un bonus. Que mon nom figure déjà sur cette liste de 10, moi personnellement je me dis qu’on a fait quelque chose de grand. Avoir la victoire, c’est bien, ça me bénirais mais je pense avoir atteint une étape.
T.A : Qu’est ce qui te distingue des autres candidats selon toi ?
J.P : Je ne peux pas dire qu’il y a un élément qui me distingue parce que tous les artistes, ils ont forcément quelque chose de diffèrent mais je pense aussi que ma particularité, c’est le fait d’être moi. C’est aussi le fait de ne pas être faux, je n’essaye pas d’imiter quelqu’un, je n’essaie pas d’avancer à une vitesse qui n’est pas la mienne. Comme j’aime bien le dire, le but est d’arriver et non de courir. Moi je suis convaincu que je reste moi, je suis quelqu’un de particulier.
T.A : Tu es probablement le premier artiste de Goma à être finaliste pour ce prix. Comment tu gères cette pression ?
J.P : C’ est sûr, quand on atteint un certain niveau, c’est une responsabilité. Il faut que dans le futur on puisse arriver à plus grand que ce qu’on fait déjà. La pression est telle qu’on doit donner le maximum malgré la connexion mais aussi, on ne va pas se plaindre. Aujourd’hui, le monde se fout du processus. Les gens sont là juste pour voir le résultat. On doit donner beaucoup parce que c’est ça que les gens attendent.
T.A : En 2022, tu as été le seul congolais à participer à la coupe du monde de slam qui s’était tenue en Belgique. Qu’est-ce que cette expérience t’a apporté de plus dans ta jeune carrière ?
J.P : Tout ce que nous traversons fait en sorte que nous devenons quelqu’un. Ce que je suis aujourd’hui, c’est la somme de tout ce qu’on a vécu. Il y a des moments où il y a des échecs et on grandit avec. Je pense que je suis l’ensemble de tout ce que j’ai traversé et je me dis que dans la vie, il y a le bas qui nous fait grandir et le haut qui nous fait découvrir. Dans tous les sens, moi je fais confiance au processus. Le plus important ; c’est là où nous allons. L’avenir est plus grand et nous réserve plus grand. Il ne faut pas négliger le processus. La coupe du monde m’a apporté grand en termes d’expérience, de découvertes et je ne me plains pas.
T.A : Actuellement, tu t’identifies comme rappeur, slameur et chanteur. Es-tu toujours le meilleur rappeur de Goma comme tu le revendiquais il y a quelques années ?
J.P : Je pense qu’il y a beaucoup de choses qui n’ont pas changé. Dans le rap, ça fait partie de certaines étapes ou il y a l’ego trip. J’espère que les gens le prenaient aussi de fairplay parce que ça peut énerver certains rappeurs. Je pense qu’aujourd’hui, pour moi, être le meilleur rappeur ne représente plus grand-chose. C’est vrai un moment, j’ai envie de me la péter mais aujourd’hui, je me fous des titres parce que le roi des abeilles est une reine. Aujourd’hui, ça importe peu. Les gens ont juste besoin de résultats. J’aimerais bien offrir ce que les gens ne connaissent pas, peut être qu’un jour ils vont comprendre pourquoi, avant je le disais.
T.A : C’est quoi ton message au peuple congolais pour cette finale du Prix Découvertes RFI ?
J.P : J’aimerais juste inviter les gens à voter massivement pour moi. On le fait pour la culture. Quand il y a un artiste dans cette compétition, il y a aussi des yeux qui sont rivés vers notre ville et ce n’est pas rien. C’est vrai, aujourd’hui, c’est Paria qui est là mais il n’y a pas que moi derrière ce combat. C’est de jeunes qui ont envie de faire de la musique, c’est de jeunes qu’on inspire mais aussi je pense c’est une porte pour dire qu’on n’a pas besoin d’être dans certaines villes pour que certaines personnes nous voient. La situation est terrible dans notre région mais la culture résiste, elle doit survivre et voter pour moi, c’est une manière de dire qu’on a résisté.
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