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RDC : Lecture Politologique de l’Expédition des Affaires Courantes (Tribune)

RDC : Lecture Politologique de l’Expédition des Affaires Courantes (Tribune)

Etat de lieu

La République Démocratique du Congo se doit d’installer les nouvelles institutions issues des élections du 20 Décembre 2023. Cet exercice constitutionnel est la suite logique de la désinstallation des anciennes institutions, devenues illégales. Le Gouvernement est une des institutions théâtre de cette mutation.

L’alinéa 1er de l’article 108 de la Constitution, consacrant l’incompatibilité entre le mandat de député national et une fonction dans le Gouvernement, obligeait tous les ministres du Gouvernement SAMA 2, élus députés lors des derniers scrutins à se situer entre ces deux institutions, selon la logique : « Soit on est député, soit on est ministre ». Ils avaient jusqu’au mardi 20 Février 2024 pour se prononcer quant-ce. Et comme on pouvait s’y attendre, plusieurs l’ont fait, y compris le Premier Ministre Jean Michel SAMA LUKONDE.

Cependant, pour raison d’État, le Président de la République via son cabinet a demandé au PM et à tout son gouvernement d’expédier les affaires courantes. Un appel qui est non seulement « contralegem = Contraire à la loi » , mais qui surclasse surtout l’arrêt de la Cour Constitutionnelle ayant envoyé balader le PM SAMA LUKONDE, dans son recours pour « le maintien de son Gouvernement malgré les incompatibilités, pour assurer la continuité de l’État ».

Depuis la demande formulée par le Président Felix TSHISEKEDI à ses compagnons de l’exécutif, une polémique enfle sur les réseaux sociaux des congolais. Un éclaircissement politologique me paraît donc idoine à cet effet.

Expédier les affaires courantes, Quid?

Ce concept technique échappe au commun de mortel. Seuls (généralement) les initiés aux domaines du droit et de science politique s’en imprègnent le sens à la première ouïe.

D’abord, il sied de comprendre qu’une autorité administrative, pour poser des actes administratifs, elle doit être munie des compétences lui conférées par la loi (La compétence est d’attribution). Ces compétences sont multiformes. Elles sont à la fois matérielles (Les matières sur lesquelles l’autorité administrative doit décider), territoriales (Les limites géographiques de son pouvoir), personnelles (La personne même désignée par la loi ) et temporelles ( l’intervalle de temps durant lequel l’autorité peut poser des actes administratifs).

Dans le cas d’espèce, c’est de la dernière compétence (Temporelle) ou « Ratione Temporis » dont nous allons parler, pour comprendre la portée de l’expédition des affaires courantes par les membres du gouvernement congolais.

Un ministre obtient la compétence temporelle de décider dans le cadre de ses attributions à partir de son investiture. Cette compétence s’étend jusqu’à la désinvestiture qui peut se manifester de plusieurs manières y compris la démission.

Cependant, la compétence temporelle jouit d’une dérogation légalement acceptée. Celle relative au principe de continuité de l’État qui voudrait que, le Gouvernement assure l’expédition des affaires courantes, jusqu’à l’installation du nouveau gouvernement, question de ne pas laisser la place à un vide d’État. Ainsi, les ministres démissionnaires gèrent les affaires courantes. MAIS COMMENT ?

En pratique

L’expédition des affaires courantes repond à un certain nombre des règles, pour la plupart non codifiées. Ainsi, le concept « principe » irait le mieux. Ce n’est donc pas pour rien que certains doctrinaires la nomment « la capitis diminutio » ou « La restriction du pouvoir ».

En gros, les ministres expéditionnaires expéditifs ou expéditionnaires ne gèrent que les affaires en cours d’exécution (courantes). Leur pouvoir ne se limite qu’aux processus déjà enclenchés et qu’il faudrait expédier, de peur d’handicaper l’évolution normale de l’appareil gouvernemental. Rien ne se crée !

Dans cet interrègne, les Ministres expéditionnaires ne peuvent donc ni engager des dépenses publiques autres que celles liées aux charges du personnel, ni céder, transferer ou aliéner les biens du domaines publics et privés de l’État et encore moins recruter, nommer ou promouvoir les nouveaux agents au sein de leurs cabinets et secteurs.

Cependant, il peut arriver, pendant cette periode d’interrègne qu’une urgence nécessitant le dépassement de fonctions se pose. Le flou juridique et théorique entretenu autour de ce régime pourtant régulier peut, dans le cas d’espèce, légitimer une certaine intervention contre-nature du Gouvernement démissionnaire, dont la portée s’apparenterait pour le coup à celle d’un Gouvernement normal.

A propos de l'auteur

Par: Gaéthan Kombi

Politologue, Chercheur en Sciences Politiques et Administratives. Éditorialiste, Consultant politique et Chroniqueur sportif.
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